C'est l'histoire d'une fleur bleue qui n'a plus de racines à force d'être dépotée
Adélaïde se dit qu’Aphrodite est partie, la déesse de l’amour, mais aussi de la beauté.
Elle voudrait rendre Martin jaloux, mais Martin n'en a rien à foutre, ils n'en ont jamais rien à foutre quand ils ont classé le dossier. Ils sont capables de cloisonner, les sentiments, l'orgueil, les blessures ne suintent pas. Ils ne ressentent pas la plaie que laisse béante la rupture, la plaie n'existe pas, eux ils traitent un dossier, le dossier est fermé, ils passent à autre chose.
Ça peut-être ça aussi, le destin d'Adélaïde, elle a connu le couple, des décennies d'amour, s'est toujours ennuyée. Elle sera à jamais une femme célibataire, ce statut finira par la sécuriser. Le célibat n'est pas du tout le mot solitude, pour qui sait le remplir autant que s'y déployer. Adélaïde Berthel, une femme comme un tas d'autres. Qui n'a pas besoin d'homme pour se sentir exister.
Depuis les débuts de son célibat, le petit groupe la soutient comme ça. Le pilier est sororal (de soeurs), c'est un socle essentiel. Adélaïde ne pensait pas qu'un jour l'amitié aurait dans sa vie une place prépondérante.
Il n'y a que l'amitié et la sororité qui préservent de l'abîme. Mode de vie adapté, en cercle se regrouper, s'organiser pour rire et ne pas crever toute seule.
Il y a plus de femmes que d’hommes et ils meurent en premier. À défaut d’être lesbienne, il faut être inventive. Qu’Aphrodite soit partie ou qu’elle préfère rester. Certains peuvent être en couple, mais rongés de solitude. Il n’y a que l’amitié et la sororité qui préservent de l’abîme. Mode de vie adapté, en cercle se regrouper, s’organiser pour rire et ne pas crever toute seule.
À moins qu’Adélaïde ne rencontre personne. Personne qui lui convienne, l’émeuve et la fasse rire. Le cœur d’Adélaïde est devenu exigeant et il n’a plus besoin qu’on le remplisse à tout prix. Adélaïde a pris conscience que jamais dans le réel n’existera Vladimir. Qu’elle correspond statistiquement aux exclues du marché, les femmes surdiplômées trouvent moins facilement de compagnon. Les hommes sous-diplômés aussi. Eux, ils se font rafler leur proie par des forces de frappe économiques supérieures. Les femmes trop cultivées effraient, fatiguent, déstabilisent. Adélaïde appartient à une génération peuplée de mâles alpha, qui rendent sa condition de femme hétérosexuelle difficile à gérer. Elle se refuse à devenir misandre(sentiment de mepris vers le sexe masculin), pourtant parfois elle se dit que ça lui pend au nez.
L’automne dévore les crépuscules, Adélaïde enfin accepte son célibat. Elle se dit que c’est une phase et qu’elle doit l’accueillir, qu’à trop vouloir lutter son ego et son cœur finiront abîmés. Adélaïde est raisonnable, elle s’incline, elle n’a pas le choix. C’est écrit dans les chiffres, bien plus de femmes que d’hommes, elle ne peut se soustraire à la réalité.
Adélaïde croyait exister hors du regard des hommes, s’être construite au-delà de leur désir. Aujourd’hui qu’elle devient un produit obsolète, la régression la guette, elle est assujettie. Elle préférerait tant être lesbienne, ses goûts sexuels, elle les maudit. Adélaïde ressent une forme de colère, elle aimerait être capable de se passer du couple. Elle se veut autonome, parfaitement accomplie. Pour autant ce manque l’accable.
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